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2023-11-01 Articles

Marika et la déclaration assermentée

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1er novembre 2023

Marika raccroche le téléphone après une longue conversation avec son client, M. Légaré, qu’elle représente dans une action en vices cachés, et dont l’interrogatoire après défense a eu lieu il y a quelques semaines.

Lors de cet interrogatoire, cinq engagements ont été souscrits par M. Légaré, ainsi divers documents devront être transmis à la partie adverse.

Malgré des recherches exhaustives dans ses archives papier et électroniques, M. Légaré n’arrive pas à retrouver l’un des documents demandés dans le cadre des engagements, soit un ticket de caisse.

Devant faire la preuve qu’il ne peut fournir cet engagement, par déclaration écrite assermentée, M. Légaré va attester des différentes recherches effectuées avec diligence pour retrouver ce document, mais que ces démarches ont été infructueuses puisque le ticket de caisse demandé n’a pu être retracé.

Afin d’être assermenté, M. Légaré a rendez-vous cet après-midi avec madame Gagnon, commissaire à l’assermentation qui sera présente au bureau de Marika. Pris dans la circulation, il se rend tardivement à ce rendez-vous.

À son arrivée, M. Légaré apprend que Mme Gagnon a malheureusement dû partir. Marika, ne pouvant assermenter son client, demande à sa collègue et associée du bureau, Me Léveillé, de bien vouloir assermenter celui-ci.

Me Léveillé rappelle immédiatement à Marika qu’elle ne peut l’aider, car en vertu de l’article 221 de la Loi sur les tribunaux judiciaires[1] :

« Les commissaires nommés en vertu des articles 214 et 215 et les personnes mentionnées aux articles 219 et 220 ne peuvent recevoir la déposition sous serment de leurs père et mère ou de leurs parents, leurs frères et sœurs, leur conjoint et leurs enfants, ni celle d’une partie qu’ils représentent dans une cause ou dans une procédure non contentieuse, excepté, pour les notaires, les cas où la loi les y autorise. »

Selon l’article 219 de cette loi, les avocats qui sont inscrits au tableau de l’Ordre du Barreau, sur tout le territoire du Québec, peuvent faire prêter le même serment qu’un commissaire à l’assermentation qui est nommé en vertu de l’article 214.

En outre, relativement à l’article 221 de la Loi sur les tribunaux judiciaires[2] :

«[11] Cet article est clair, un avocat ne peut assermenter son client lorsqu'il le représente dans une cause ou dans une procédure non contentieuse. La jurisprudence précitée a élargi la portée de cet article pour y introduire le concept que tous les avocats d'une même firme ne peuvent assermenter un client de leur confrère, dans une cause ou dans une procédure non contentieuse. 

[12] La cour d'appel est claire dans Dansereau et Arsenault Ltée c. Trust Général du Canada, J.E. 96-5238, l'article 221 n'interdit pas à l'avocat de recevoir le serment de son client dans tous les cas. Il l'empêche seulement de recevoir le serment d'une partie qu'il représente dans une cause, ou une procédure non contentieuse.[3]»

L’interdiction pour un avocat de recevoir le serment d’une partie qu’il représente dans une cause est d’ordre public[4].

En matière de déclaration écrite assermentée, de telles erreurs sont encore trop fréquentes et peuvent mener à une réclamation, voire à une poursuite en responsabilité professionnelle pour l’avocat. La prudence est donc de mise!

 

[1] Loi sur les tribunaux judiciaires, RLRQ, c. T-16, art. 221.

[2] Id.

[3] Constructions Naslin inc. c. Spyros, 2014 QCCQ 1600. Voir également la décision Beratta Construction inc. c. Investissements Pliska inc., J.E. 92-164.

[4] Beratta Construction inc. c. Investissements Pliska inc., J.E. 92-164, Tétreault c. Loubert, [1975] R.P. 300 (C.S).